A chaque fois que quelqu’un me demande de lui conseiller un livre, je propose sans hésiter Crime et châtiment. C’est un roman génial ! Je l’ai lu une première fois il y a quelques années et j’en avais gardé un excellent souvenir. C’est avec un peu d’appréhension que je l’ai relu (j’ai décidé de relire tous les livres de ma bibliothèque et d’après mes calculs, j’en aurai fini dans quatre ans mais ça c’est une autre histoire). Je m’attendais à être ennuyée, à abandonner ma lecture, ou pire, à me rendre compte que j’avais sacralisé un roman qui n’était particulier que parce que je le découvrais. Bref, je ne pensais pas avoir le cœur qui bat la chamade, à être indignée quand il arrive des malheurs aux personnages et encore moins à me sentir aussi nostalgique une fois le livre refermé.
Crime et châtiment est un roman policier d’un genre un peu particulier. Dès la première partie, on connait l’identité de l’assassin et pour peu qu’on ait une culture littéraire, on sait qu’il finira par se rendre à la police. La tension narrative ne repose pas sur les actions des personnages mais sur leurs mobiles et leur psychologie ; c’est d’ailleurs cela qui fait qu’on est capable de relire le roman avec plaisir.
Le héros -qui est bien peu héroïque- Raskolnikov souffre d’une fièvre dont il ne guérira qu’à la toute fin du roman. C’est un jeune homme souffreteux et irascible qui a dû abandonner ses études de droit faute d’argent. Souffrant terriblement du manque d’argent et de la solitude, il s’enferme chez lui et se laisse tomber dans le marasme. De cet état morbide, il garde une idée fixe. C’est en tuant une vieille usurière envers qui il a eu vive antipathie qu’il pourra s’en sortir. Ce meurtre lui permettrait de reprendre ses études, de subvenir aux besoins de sa mère et de sa sœur et d’accomplir de grandes choses pour l’humanité. D’autre part, ça ne serait presque pas un crime, pensait-il alors, car cette vieille femme est mauvaise et pingre, elle ne mérite pas de vivre.
De plus, il défend une théorie selon laquelle il existe deux catégories de personnes sur terre, les forts et les faibles. Les faibles constituent évidemment une grande partie de l’humanité, c’est la masse qui courbe l’échine et obéit aux lois par peur et par lâcheté. Les forts en revanche se comptent sur les doigts d’une main. Ce sont les grands hommes, les leaders, les visionnaires. Ils sont promus à un grand destin et sont capables de changer l’ordre du monde ; ce sont les Napoléon et les Mahomet. Et si pour accomplir un bienfait pour l’humanité ils doivent raser un village ou massacrer une vieille dame, ils en ont le droit : ils ont la permission morale de tuer. Fort de cette théorie, Raskolnikov tue ; il juge qu’il appartient au rang des forts. Malheureusement pour lui, son meurtre se transforme en double meurtre puisqu’il a été obligé d’éliminer un témoin gênant.
Après avoir commis ce crime, il ne peut plus vivre comme avant. Il se rend compte que ses calculs n’étaient pas bons. En vérité, lui aussi est faible. En tuant la vieille femme, c’est lui-même qu’il a tué car en commettant cette barbarie, il n’est plus digne de vivre en société, il ne peut plus vivre comme les autres parmi les autres. Être un paria c’est là son châtiment.
Outre le récit du crime de Raskolnikov, le roman nous montre surtout comment ce crime a eu un effet dévastateur sur le jeune homme. C’est donc la partie qui porte sur le châtiment qui est la plus longue. Ce châtiment est avant tout d’ordre moral. C’est une fable qui montre ce qui peut arriver à une homme qui s’est laissé séduire par les idées à la mode et qui décide de faire fi de toute loi morale en pensant, à tort, qu’il est un surhomme.
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